Le dernier Berger de Lugny

Publié le 21 Mai 2007

Naguère, dans les rues de Moissy-Cramayel, on croisait fréquemment les troupeaux de moutons qui allaient paître dans la campagne ou même tout simplement  sur la place de la mairie. Edouard W. a été  le dernier berger de la ferme de Lugny où il est arrivé en 1952 venant de Pologne.

 Il raconte :

"Il y avait trois cents ou trois-cents-cinquante mères. C'était un troupeau de taille normale, soit environ sept cents bêtes. De mai à octobre, on sortait les moutons quatre ou cinq heures dans les champs,  dans le sainfoin ou dans la luzerne et dans les chumes après la moisson. Jusqu'en novembre, ils allaient manger des feuilles de betterave dans les champs une fois qu'elles étaient arrachées.

L'hiver se passait dans les bergeries. En février, c'était la saison de l'agnelage. Après la naissance, on séparait la mère et l'agneau du reste du troupeau, le temps que l'agneau s'habitue à têter sa mère, puis on les rassemblait avec les autres. Quelquefois, la mère chassait l'agneau. alors il fallait les maintenir ensemble quelque temps dans une cage spéciale. Si une mère avait deux agneaux, elle n'avait pas assez de lait pour les deux : j'en nourrissais un des deux au biberon, trois fois par jour. Quand l'agneau avait quatre ou cinq mois, on le vendait à la Villette, à Brunoy ou a Melun. Les bouchers venaient les chercher. Chaque année, on renouvelait le troupeau de mères en en vendant cinquante. Quand elles avaient eu quatre agneaux, elles étaient trop vieilles pour la reproduction.

J'allais faire manger les moutons sur la place de l'église et là, où il y a des H.L.M. maintenant, au Marchais Basson aussi et au Noyer Perrot. J'avais trois chiens, deux Bas-rouges et un Briard noir, frisé, qui s'appelait Fidèle.

 

Jean-François Millet 1814-1875 Berger ramenant son troupeau le soir

 http://store.encore-editions.com

C'était beau la campagne dans ce temps-là, avec les troupeaux. Quand il faisait très chaud, l'été, on les emmenait très tôt et on rentrait à une heure. autrement, on partait à une heure de l'après-midi, pour rentrer à six heures.

A ce moment-là, il y avait trente vaches et dix chevaux à Lugny. Il fallait une vingtaine d'ouvriers : le cochonnier, trois charretiers, un vacher, un garçon de cour, des hommes de journée, le commis (chef de culture), plus les saisonniers, des Espagnols qui venaient pour biner les betteraves.

Tous les ans, avant l'agnelage, on tondait pour pouvoir marquer les mères et les agneaux du même numéro. Sur la laine épaisse, les numéros ne marquaient pas. La laine était vendue en gros dans des coopératives. Quand les patrons sont morts, je suis parti travailler en usine, à Paris."

extrait du livre de Marie-Elisabeth  Rouvières

A travers les siècles Moissy- Cramayel - un Village de Brie - 23 septembre 1981

 

Rédigé par Marie de Mazan

Publié dans #Moissy Cramayel de siècle en siècle

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E
C'est beau et triste à la fois! On a du mal à imaginer qu'il y a à peine 50 ans, on menait une vie agreste par ici... Maintenant, nous avons encore de belles et immenses fermes disséminées ça et là témoin de cette époque révolue, mais il faut espérer que l'on ne va pas urbaniser davantage notre coin (notamment autour de Marne-et-Gondoire encore préservé par un classement).<br /> A Saint-Thibeault-des-Vignes, jouxtant Gouvernes, il y a encore une ferme avec des vaches, des cochons, des poules... On peut y acheter des produits laitiers, des poulets frais, des fruits et des légumes de la région!
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F
oui un autre temps qui ne reviendra pas des demains dans notre belle Brie.<br /> Actes sud à publié un très belle ouvrage de photos de Doisneau sur la transhumance !<br /> j'espère que tout va bien pour toi <br /> @++
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M
On garde encore la tradition de nos jours dans les villages du sud pour la transhumance. J'ai eu l'occasion de voir partir les troupeaux en montagne. C'est l'effervecence, la joie. En vacances, quand j'étais gamine j'allais garder les vaches...<br /> Taaaaaaaaaa la césarine, taaaaaaaaaa la blanquette !